Vers 1885, Emile Perruchoud, instituteur, domicilié à Chalais, réside à Nendaz deux hivers durant ; il enseigne le solfège pendant les longues soirées de la froide saison. Il se déplace jusqu'à Veysonnaz, Clèbes et Verrey qui font alors partie de la paroisse de Nendaz. Quelques années plus tard, ces trois villages fournissent un contingent d'une vingtaine de chantres au choeur paroissial de Nendaz.

Ainsi, lors de la pose de la première pierre de l'église de Veysonnaz, en 1907, les membres de la chorale sont en mesure de chanter une messe à trois voix, la "messe des pèlerins". On ne connaît pas d'acte de fondation de la chorale de Veysonnaz, on sait cependant qu'une société de chant dénommée "chant d'Eglise" apparaît dès l'inauguration de l'église. Jusqu'en 1913, les chantres de Veysonnaz assurent encore le service à l'église de Basse-Nendaz, un dimanche sur trois. Depuis lors, sous la direction de Jean Fournier la chorale chante essentiellement à Veysonnaz et à Clèbes. Dès 1921, Lucien Fragnière est désigné comme directeur ; le choeur d'hommes participe au festival d'Evolène en 1925, reçoit son premier drapeau le 11 avril 1926 et chante au festival de Saxon en 1927.

Ces mêmes années, des problèmes apparaissent au sein de la société. Une partie des membres de la Chorale, les jeunes surtout, fondent une nouvelle société qui s'appelle "l'Echo des Glaciers". Les membres de cette nouvelle chorale revendiquent le droit de pouvoir aussi chanter à la tribune, ce sont essentiellement des personnes appartenant au parti Fournier. Le conflit est porté à la connaissance de l'évêque du diocèse qui interdit aux membres des deux sociétés de chanter à la tribune ; pendant quelques mois, la messe dominicale n'est pas chantée.

Dans ce contexte, l’évêque décide de faire passer un examen à tous les membres des deux sociétés et il choisit dix chantres de Clèbes et Verrey, dix du parti Fournier et dix du parti Délèze. Après cet examen, trente membres font partie de la Chorale et lorsqu'un membre de l'un des partis quitte la société, c'est un jeune de ce même parti qui est appelé à passer l'examen d'entrée.

En 1950, un nouveau curé est nommé à Veysonnaz : l'abbé Meinrad Vannay. Ses onze ans de ministère sont pour la Chorale Ste-Cécile l'occasion d'un renouvellement et la foule apprend à chanter. L'abbé Vannay met sur pied, en plus de la Chorale, un choeur mixte paroissial qui chante aux grandes fêtes et à diverses occasions. C'est sous son influence et ses conseils que la Chorale de Veysonnaz se décide à faire partie de l'Union Chorale du Centre qui regroupe la plupart des sociétés de chant du Valais central.

En 1952, on change également de directeur, Julien Bonvin, instituteur, reprend la baguette. Après cinq ans, il s'établit à Sion et Aloys Praz accepte la direction de la société. Il est secondé dans sa tâche par Aloys Fournier, professeur, qui dirige les pièces en polyphonie.

chorale 1983Depuis 1968, c'est Michel Praz qui assume la direction de la Chorale Ste-Cécile dont le rayonnement dépasse les frontières de la commune. Pour ne retenir qu'un exemple, elle participe, en 1978, à la fête cantonale des chanteurs à Brigue et organise la même année, pour la deuxième fois, le festival de l'Union Chorale du Centre. C'est peu dire que de souligner combien la mise en place de ces festivités a été une occasion de mobilisation des énergies les plus inventives de toute la population de Veysonnaz, Clèbes et Verrey. D'ailleurs, la relève semble assurée puisqu'en 1972, Jean-Norbert Théoduloz, instituteur, fonde un choeur d'enfants dont la direction est reprise quatre ans plus tard par Christian Lathion qui en fait le "Choeur des jeunes".

Aujourd'hui, la Chorale Ste-Cécile est un choeur d'hommes d'une trentaine de membres. Elle chante dans les offices dominicaux, les grandes fêtes religieuses, les mariages, les enterrements etc.. De plus, elle organise chaque année un concert, elle participe aux festivals de l'Union Chorale du Centre et assure régulièrement des prestations à l'occasion de fêtes populaires ou de réceptions.

Nous disions plus haut combien la vie des sociétés locales et la vie sociale en général sont profondément interdépendants. On ne saurait mieux illustrer cette réalité qu'en évoquant une anecdote dont plusieurs se souviennent avec émotion, c'est l'histoire du drapeau. A la fin de l'année 1925, les responsables et les membres de la Chorale décident d'acquérir un drapeau ce qui, à l'époque, n'était pas une petite affaire. On prend conseil dans les alentours ; le chanoine Eugène Fournier, curé de Vétroz, donne aux responsables l'adresse d'une maison tessinoise ; on demande à Henri Délèze, instituteur, de prendre contact avec cette entreprise. Au début de l'année 1926, on fixe la date de la bénédiction du drapeau au 11 avril. La Chorale invite à cette manifestation les présidents des communes voisines et de Sion, le préfet du district et diverses personnalités ; la fanfare Rosablan-che de Nendaz est également de la fête.

Après les festivités, le drapeau est entreposé chez Henri Délèze, parrain du drapeau. Mais en 1946, un litige éclate. Les membres du parti Fournier veulent déposer le drapeau dans un placard à la tribune de l'église, tandis que ceux du parti Délèze désirent le placer à la cure dans un meuble qui aurait été construit à cet effet. Plusieurs membres de la Chorale écrivent à l'évêque du diocèse la lettre suivante :

Excellence,

En qualité de membres de la société chorale de Sainte-Cécile de la paroisse de Veysonnaz, nous prenons la respectueuse liberté de vous informer que nous nous voyons dans l'obligation de recourir auprès de votre haute autorité, contre la décision de Monsieur le Révérend curé Zuber concernant notre drapeau, et que vous avez sanctionnée de votre approbation.

Voici les motifs que nous invoquons, pour justifier notre attitude dans un pareil litige.

1. Tout d'abord nous affirmons qu'aucune décision valable n'a été prise par la société de Sainte-Cécile, pour exiger que le drapeau soit déposé à la tribune de l'Eglise.

En effet nous avons assisté à deux "répétitions" où il a été question du drapeau, nous avons eu des discussions violentes pour ne pas dire davantage, mais aucune proposition formelle n 'a été votée et rien n 'a été protocole. D'ailleurs, Monsieur le Révérend curé de la paroisse n 'a jamais été présent dans nos réunions, et en vous écrivant à ce sujet, il ne pouvait parler que par la bouche des tenants du clan politique Fournier. Nous estimons que dans les circonstances telles que nous vivons actuellement dans notre commune de Veysonnaz, une décision valable, en bonne et due forme, concernant le drapeau, ne peut être prise légalement que par une assemblée générale de la société convoquée au préalable par écrit, avec ordre du jour indiqué.

Il est enfin nécessaire de préciser qu'une telle exigence de remettre immédiatement le drapeau dans un placard de la tribune de l'église, est née principalement en vue de satisfaire les ambitions d'une majorité politique qui vient de voir le jour dans la commune de Veysonnaz. Nous déplorons sincèrement que Monsieur le Révérend Curé Zuber se soit laissé prendre au jeu mesquin de ces Messieurs.

2. En second lieu, nous tenons à porter à votre connaissance, Excellence, que nous ne nous opposons nullement à ce que le drapeau soit déposé dans un local paroissial. Dès le début du présent litige, nous avons proposé qu 'il soit mis en dépôt à la cure, dans un buffet aménagé à cet effet. Ainsi le drapeau était en sécurité et directement sous la surveillance du chef de la paroisse. Par le fait même les attitudes intransigeantes prises respectivement par les deux fractions de notre société n'avaient plus leur raison d'être. Mais notre proposition fut rejetée, y compris par Monsieur le Curé. Et cela, nous le savons, pour sauvegarder à tout prix certaines prérogatives politiques.

Nous croyons que dans une société à but religieux, c'est l'élémentaire charité de savoir concilier les postulats raisonnables de chacun des ses groupes...

Après plusieurs assemblées et délibérations, le drapeau est placé à la cure dans un endroit approprié et mis sous surveillance du curé de la paroisse. Lors de la rénovation de la cure, un placard spécial est construit à cet effet. Ceci dit, la Chorale Ste-Cécile est certainement la société locale qui bénéficie de la plus longue histoire, elle a marqué profondément la vie culturelle de Veysonnaz.