Le Nouvelliste 24.08.2021

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Le sociologue Jean-Pierre Fragnière est décédé

«Il faut savoir mettre un point final: accepter l'horreur et accepter la mort.» Jean-Pierre Fragnière avait osé la mort. Celui qui a fait du rallongement de l'espérance de vie son champ d'étude est décédé dimanche soir. Le docteur en sciences sociales luttait contre un cancer depuis de longues années.

Né en 1944 à Veysonnaz, le «petit d'Henri de la scierie de Jacques Pomme de terre», comme il était fier de se qualifier, est ordonné prêtre à 25 ans. Il quitte les ordres deux ans plus tard avant d'embrasser une carrière académique. Professeur de politiques sociales, il participe à la création et sera le directeur scientifique de l'Institut universitaire Âges et Générations à Sion. «Même s'il a surtout enseigné à Lausanne et à Genève, il a marqué toute la Suisse romande - et au-delà», ose l'ancien médecin cantonal vaudois Jean Martin, un ami de longue date.

Auteur, éditeur, Jean-Pierre Fragnière signe des dizaines d'ouvrages, met en œuvre une plateforme dédiée à la promotion de la société de longue vie et à la mise en place d'un réseau de solidarité intergénérationnelle «pour que l'allongement de la vie ne se mue pas en mise à l'écart des anciens», expliquait-il. Avec Delphine Bovey aussi, il fonde la maison d'édition Socialinfo.

(Pro)actif jusqu'au bout

«Homme de projets, force d'initiatives, Jean-Pierre Fragnière était entre l'action sociale et les hautes sphères académiques», confie, ému, le sociologue Bernard Crettaz. En 2017, les deux hommes publient «Oser la mort». «Parce que celle-ci mérite bien quelques pages», s'amusait à dire Jean-Pierre Fragnière. «Nous avions prévu d'écrire la suite, «Osez la mort: alors, vous en êtes où?» nous apprend Bernard Crettaz. «Il y a quelques jours, content, serein, Jean-Pierre m'a toutefois annoncé qu'il me faudrait le faire sans lui.»

«Un grand Valaisan»

Installé à Lausanne mais très attaché à son village de Veysonnaz, Jean-Pierre Fragnière n'a cessé de faire le voyage du Valais pour donner des conférences sur la collaboration entre générations ou la retraite. «A sa manière, il a sans doute été un grand Valaisan», résume le docteur Jean Martin.

En 2017, Jean-Pierre Fragnière confiait au «Nouvelliste» ne pas avoir envie de se consoler en se disant qu'il y avait quelque chose après la mort. «Quand je mourrai, je mourrai», marquait le sociologue de la longue vie. La sienne aura été bien remplie.

 

Découvrez aussi les hommages rendus par Le journal LE TEMPS et par Jean-Maurice DELEZE animateur de Veysonnaz-Chroniques.ch